
Du 28 novembre au 2 décembre aura lieu la première réunion du comité chargé d’élaborer un traité sur la pollution plastique. Les discussions donneront une orientation pour les deux prochaines années de négociations. De quoi aussi mesurer les forces présentes.
Du 28 novembre au 2 décembre, la première des cinq sessions prévues du Comité international de négociation (CNI) pour élaborer un traité international sur la pollution plastique débute à Punta del Este (l-Uruguay). En mars dernier, lors de la cinquième session de l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement, 175 pays ont validé l’ouverture de négociations pour lutter contre cette pollution. Objectif : atteindre, d’ici 2024, un instrument international juridiquement contraignant qui couvre toute la pollution générée par le plastique.
Quel niveau de restriction ?
A Nairobi, la communauté internationale s’est mise d’accord sur trois grands principes. Le futur texte devrait contenir des mesures contraignantes et volontaires. La mise en œuvre de mesures contraignantes dans les pays en développement s’accompagnera d’une assistance technique et financière des pays riches. Deuxième point : l’accord devra couvrir l’ensemble du cycle de vie du plastique, de l’extraction des énergies fossiles à la fin de vie des produits plastiques. Enfin, le dernier principe est de prendre en compte à la fois les pollutions marines et terrestres. Ce point n’est pas forcément évident, le Japon défendant un projet de résolution visant uniquement la pollution marine.
Parmi les sujets épineux figurent les éléments chimiques présents dans le plastique. Une étude publiée dans Environmental Science & Technology Letters, estime que l’efficacité du futur accord pourrait être compromise si le sujet n’est pas pris au sérieux. Les scientifiques expliquent que plus de 10 000 produits chimiques sont utilisés dans la production de plastique. Cette prolifération de substances, qui remplissent souvent les mêmes fonctions, rend les différents flux de déchets incompatibles et entrave le recyclage. Les auteurs appellent la communauté internationale à aborder le problème de front en limitant l’utilisation d’additifs à une liste de substances sûres qui remplissent des fonctions clés.
Une coalition de 70 ONG s’inscrit dans cette démarche et réclame une obligation de transparence sur les additifs chimiques ajoutés aux produits plastiques.
En Uruguay, les négociateurs espèrent avancer sur plusieurs dossiers. La première concerne la nature même du texte. Sera-ce une fonctionnalité en soi? Nous savons que la ratification d’un tel instrument par les États-Unis est compliquée. Les négociations ne peuvent donc aboutir qu’à un accord-cadre rattaché à un autre traité. La ligne de démarcation entre les mesures contraignantes et les mesures volontaires est une autre question clé des négociations. Sur ces sujets, le mouvement Break Free From Plastic, qui regroupe 2 700 organisations qui luttent contre la pollution plastique, défend caractéristique spécifique et des instruments véritablement contraignants avec un reporting efficace.
Les engagements volontaires montrent leurs limites
Cette demande est étayée par le dernier rapport d’étape du Global Commitment, qui rassemble depuis 2018 les engagements pris par plus de 500 organisations responsables de 20% des emballages plastiques produits dans le monde. Cette évaluation, réalisée par la Fondation Ellen-MacArthur et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), montre que les entreprises sont sur une tendance qui ne leur permettra pas d’atteindre les objectifs fixés pour 2025. Entre 2020 et 2021, plutôt que de s’améliorer, la situation s’est même aggravée : l’utilisation de plastique vierge a augmenté de 2,5 % et le taux d’emballages réutilisés est passé de 1,5 à 1,2 %.
Une fois le format choisi, il faudra s’accorder sur la définition des termes et sur le domaine couvert par le futur texte, notamment la notion de cycle de vie complet des plastiques. À ce stade, se libérer des espoirs en plastique des définitions précises et larges qui incluent tous les matériaux plastiques, tous les macro, micro et nanoplastiques, et leurs additifs chimiques. Les procédures, le calendrier et l’organisation des prochaines sessions constituent le quatrième enjeu des négociations uruguayennes. Une session devrait se tenir en France au printemps 2023.
Les acteurs sont organisés
Depuis l’adoption de la résolution de l’ONU, les acteurs concernés ont affiné leur position. La Norvège et le Rwanda (ce pays l’était déjà, avec le Pérou, après l’ambitieuse résolution adoptée à Nairobi) ont lancé la High Ambition Coalition for a Plastics Treaty (HAC). Unie à l’Union européenne et ses États membres, le Canada, l’Australie et certains pays en développement, elle défend trois principes : limiter la consommation et la production de plastique à des niveaux durables ; permet une économie circulaire du plastique qui protège l’environnement et la santé humaine ; assurer une gestion et un recyclage écologiquement rationnels des déchets plastiques.
Ces grands principes sont salués par les ONG réunies au sein de Break Free From Plastic. La coalition environnementale considère cet engagement en phase avec les attentes de la société civiletoutefois ils méritent d’être précisés. Dans ce cas, elle doit être sûre que travailler sur la réduction de la production de plastique, fortement dépendant des énergies fossiles, [sont la priorit].
Les opposants à un traité international contraignant sont bien sûr nombreux. Autant dire que le HAC ne regroupe que 35 pays. Il semble, rapportent les ONG, qu’une coalition moins favorable se dessine pour un texte contraignant. L’initiative, qui est soutenue par les États-Unis, repose sur une approche fondée sur les initiatives des États.
Enfin, les acteurs privés sont également à l’affût. C’est notamment le cas des industriels du recyclage qui voient dans le futur accord une opportunité de développer leur activité. Le Bureau of International Recycling (BIR) promeut l’élimination des plastiques non recyclables et des substances dangereuses et pour la nécessité d’une co-conception et la mise en place d’un cercle fermé. Quant aux industriels du plastique, ils demandent essentiellement des mesures souples adaptées aux différentes situations locales.
Article publié le 25 novembre 2022